La ruralité, ou plutôt les ruralités, pèsent aujourd’hui 33 % de la population et 88 % des communes. Longtemps marquées par l’involution démographique de l’exode rural, caricaturées parfois par une image rétrograde et bien souvent oubliées des politiques publiques, nos campagnes françaises ont souffert d’un retard de développement. Plus qu’ailleurs le déficit d’équipements de mobilité ou de communication, de services publiques éducation, santé conduisait à un sentiment de déclassement de nos concitoyens ruraux. Il aura fallu attendre 2017 et l’arrivée d’Emmanuel Macron pour que la France se dote, avec l’Agenda Rural, d’un cortège de mesures permettant de réduire une fracture qui devenait insoutenable. Certes, tout n’a pas été réglé en cinq ans mais les avancées concrètes sont majeures, au nombre desquelles le déploiement de la téléphonie mobile, la multiplication des Maisons France Service ou bien encore le déploiement des volontaires territoriaux de l’administration. De plus, la crise de la Covid-19 semble avoir contribué à redonner de l’attractivité à tous ces territoires qui voient s’installer de plus en plus de nouveaux habitants comme en témoigne la vitalité des transactions immobilières. Enfin, dans un contexte de changement climatique, les questions de stockage de carbone ou bien encore de souveraineté alimentaire adressent aux territoires ruraux de nouveaux défis au service de toute notre société.

 

Dans ce contexte Territoire de Progrès souhaite affirmer sa vision d’une ruralité de progrès : productive, porteuse de solutions et garante du vivre ensemble.

1. Les territoires ruraux espaces de production.

Avec 28 millions d’hectares de surface agricole utile et 17 millions d’hectares de surface boisée, les territoires ruraux sont avant tout des espaces de productions. La sphère activités rurales, au-delà des ressources en emplois et du poids économique, procure un large champ de ressources au profit de la Nation. De la souveraineté alimentaire aux matières premières de construction nos sols et ceux qui contribuent à les mettre en valeur produisent des biens communs au service de tous nos concitoyens et plus largement des tous les êtres humains.

    Proposition n°1 : Il est indispensable d’affirmer que ces nobles et essentielles missions de production sont d’intérêt général car profitant à la collectivité. Nous proposons pour les protéger et les pérenniser de faire reconnaître dans la Constitution le caractère d’intérêt général de l’agriculture et de la sylviculture.

    Proposition n°2 : Le foncier, support de toute activité agricole et sylvicole, nécessite d’être protégé en tant que part majeure du potentiel de production et donc de notre souveraineté nationale. Nous proposons une loi foncière pour protéger le foncier de tout risque de spéculation, faciliter l’accès au foncier et sa transmission en priorité au profit de qui le met en valeur et conserver notre potentiel national de production.

    2. Les territoires ruraux espaces de solutions.

     

    A l’heure où les manifestations du changement climatique se font quotidiennement de plus en plus évidentes, les activités portées par les territoires ruraux se montrent comme les principales solutions. Sans remettre en cause les potentialités des territoires urbains, il est clair que la majorité des installations de production d’énergie bas carbone, renouvelable et nucléaire, seront situées dans nos campagnes. Les cultures agricoles et forestières, capables de garantir notre souveraineté alimentaire et énergétique mais également le stockage massif du carbone, la biodiversité et les paysages, ne trouvent leur place qu’en ruralité. La résilience de toutes ces activités repose sur un accès à la ressource en eau alors même que le régime des précipitations subit d’importantes évolutions avec des épisodes générant de très forts excédents parfois catastrophiques. La maîtrise partagée de l’eau est la clé pour garantir le niveau des productions alimentaires, la préservation de la biodiversité et la lutte contre les catastrophes naturelles.

     

    Proposition n°3 : Le développement du potentiel de production d’énergies renouvelables, tel que projet dans les scénarios du rapport RTE rendu public fin 2021 dans l’objectif d’atteindre la neutralité carbone en 2050, nécessite de mobiliser tous les acteurs territoires ruraux. Nous proposons d’une part une planification territoriale à 10 ans fonction des potentiels (vent, soleil, biomasse…) par bassin de vie (* définir en note) ainsi qu’une évolution du modèle économique soutenu par les pouvoirs publics afin de garantir une répartition plus équitable de la valeur ajoutée dégagée. Il s’agit notamment de privilégier des solutions d’investissement partagés entre agriculteurs, propriétaires fonciers, citoyens et communes.

     

    Proposition n°4 : Le Varenne de l’Eau et du changement climatique, tout en initiant un modèle universel de gestion des aléas en agriculture et d’évolution des systèmes de production, rappelle la nécessité de repenser la gestion de la ressource en eau. Nous proposons au travers de la couverture exhaustive du territoire métropolitain par des Plans Territoriaux de Gestion de l’Eau qu’une large concertation débouche sur des solutions de constitutions de réserves en eau alimentées en périodes de forts excédents. Ces réserves devront nécessairement avoir des usages partagés et complémentaires entre la production agricole pour laquelle nous souhaitons créer un droit opposable d’accès à l’eau, la préservation de la biodiversité, la lutte contre les incendies et également la préservation des activités de tourisme et de loisir.

    3. Les territoires ruraux espaces de vie

     

    L’envie de campagne est une actualité, en particulier depuis le Covid, qui conduit de nouveaux habitants dans les territoires ruraux solutionnant en partie le casse-tête des politiques d’accueil. En hyper ruralité accueillir ces nouveaux venus est certes un objectif important mais il convient également de s’attacher à conserver ceux déjà en place actifs comme retraités. Le maillage des services publics et des services au public doit être garanti par des dispositions fortes. Par ailleurs dans tous les territoires ruraux le vivre ensemble est fragilisé par des oppositions entre nouveaux arrivants et habitants en place. Des frictions se font jour sur des sujets variés qui vont des pratiques agricoles aux projets d’aménagement et de construction qui prouvent la méconnaissance réciproque des réalités et des attentes de chaque partie.

    Proposition n°5 : Il est illusoire d’imaginer conserver les habitants d’un territoire hyper rural ou de permettre à de nouveaux de s’implanter durablement, sans une offre de service au public en phase avec les réalités actuelles. Dans les Zones de Revitalisation Rurales pérennisées (ZRRp) nous proposons que soit construit à l’échelle des bassins de vie, avec obligation de résultat faite aux collectivités compétentes et à l’Etat, un plan à trois ans garantissant la présence des services essentiels à la population : petite enfance, enseignement scolaire et supérieur, santé, culture, accès au haut débit, grand âge et dépendance. Sa production pourrait être confiée à une instance délibérative composée à égalité de représentants élus des collectivités et de citoyens tirés au sort.

    Proposition n°6 : Pour répondre aux attentes des Français qui souhaitent s’éloigner des villes, et des élus ruraux qui s’inquiètent de ne pas pouvoir les accueillir compte tenu de la réduction nécessaire de l’artificialisation des sols, nous pourrions proposer un programme « Villages d’avenir » afin de remettre sur le marché du locatif, mais également de l’acquisition des biens actuellement inoccupés. Il s’agirait pour l’Etat de co-financer la rénovation des maisons de centre-village, de hameaux et de corps de ferme avec les communes et les propriétaires, le tout grâce au soutien d’un fonds public doté de 1 milliard d’euros à l’échelle du quinquennat.

    Proposition n°7 : Connaître et se connaître est la meilleure assurance pour développer le vivre ensemble, les temps de formation sont parmi les plus favorables pour développer ces affinités. Nous proposons que dès l’adolescence les jeunes urbains aient la possibilité de suivre leurs études secondaires en ruralité dans des lycées aux compétences renforcées et reconnues. Ces possibilités d’étudier dans les zones rurales seront étendues à l’enseignement supérieur grâce à un programme Erasmus des territoires. Il sera également créé des missions rurales proposées aux jeunes en SNU. Enfin, parce qu’à tout âge se rencontrer pour se comprendre est facteur d’inclusion, nous proposons qu’un parcours d’inclusion en ruralité pour les nouveaux arrivants sanctionné par une cérémonie d’accueil soit systématisé à l’échelle des bassins de vie.

    Proposition n°8 : La culture, surtout quand elle est partagée à l’occasion de temps collectifs, est un facilitant du vivre ensemble. Indéniablement une offre culturelle dynamique est également un facteur d’attractivité pour les territoires ruraux, c’est d’ailleurs un des axes proposés par le programme Petites Villes de Demain. Afin que la culture essaime dans toutes les villes et villages de nos espaces ruraux, et pas seulement dans les centralités des bassins de vie, nous proposons la création d’un Passe Partout Culture afin qu’annuellement au moins un spectacle (concert, théâtre, cinéma…) soit proposé à tarif très accessible dans chacune des communes rurales de France.

     

    Toutes ces propositions qu’elles reposent sur les collectivités, les habitants des territoires ruraux ou bien encore les actifs nécessitent un renforcement des moyens mobilisables et une simplification pour y accéder, nous proposons :

    • De soutenir la genèse et le déploiement d’un agenda rural européen en complément de l’agenda rural français afin de doter significativement les politiques de cohésion en faveur des territoires ruraux.
    • De confier aux services de l’Etat en département une mission d’ingénierie de financement afin d’aider les plus petites communes au montage et à l’optimisation des dossiers de demande de subvention.
    • D’élargir, comme le permet la réglementation européenne, le taux d’aides publiques à 95 % des dépenses pour toutes les communes de moins de 500 habitants et qui sont situées en ZRRp.
    • D’étendre le dispositif fiscal actuel de péréquation biodiversité à la contribution des territoires ruraux à la captation du carbone.

     

    Par le Groupe de travail « ruralité »